Transhumance 2025 – RETOUR

Jour 2

La moitié de la famille de Lahcein reste encore quelques jours, l’été était fécond et les chèvres ont mis bas d’un ou deux petits. Il a eu beaucoup de chevreaux nés à Tamda, et avec la fin du nomadisme il y a moins de « bras » pour aider au chargement des chevreaux sur les ânes et les chamelles. Les grandes familles se sont éclatées, chacun souhaitant son indépendance face au système ancien patriarcal, plusieurs fils des familles préférant travailler ici et là que conduire bénévolement les troupeaux de la grande famille. C’est l’évolution de la modernité, soif d’une meilleure vie, moins rude, plus douce où les enfants peuvent s’instruire à N’kob.
La moitié du troupeau rentrera dimanche avec un camion qui chargera les brebis, les chèvres avec leurs petits accompagnés de la grand-mère et transportera la lourde tente en laine.
La caravane sera plus légère pour transhumer. C’est ainsi que feront les six familles restantes des Ait Atta venues à Tamda pour la transhumance cette année.
Combien de familles reviendront l’année prochaine à Tamda ?
Les chamelles et le mulet de la famille sont chargés, la petite caravane se met en route pour dix jours de traversée de l’Atlas. La maman et sa fille conduisent les chèvres sur le flanc de l’Ighil n’Ifrane pour basculer sur le vallon d’Imin’Ikkis.
Au tizi’n Tighist 2600 mètres nous suivons 400 mètres la petite route goudronnée d’accès aux Aït Bougmez, pas facile pour le croisement des chamelles et leurs chamelons avec un camion remontant de Tabant chargé de 18 tonnes de pomme de terre.
Le vallon défile, petite pose à la source pour remplir deux bidons d’eau clair.
Le bivouac est installé juste au pied des pentes Ouest de l’Azourki à 2220 mètres d’altitude.
Il fait bien chaud, le groupe s’arrête sous un thuya le temps de monter notre tente nomade en toile pour s’abriter du soleil.
Mohamed aidé de Catherine nous prépare une salade succulente, accompagnée de plusieurs fromages frais de chèvres venus de France ! amenés dans les bagages de deux voyageurs.
Après une petite sieste je pars avec Catherine et Philippe marcher dans la haute vallée de Bougmez « Aït Keum », découvrir ce petit paradis si vert au milieu des plis des montagnes. Les jardins sont couverts de champs de pommes de terre, de luzernes, de plusieurs sortes de navets, de pommiers dont les fruits rouges sont magnifiques cette année. Les chemins bordés de cynorrhodons aux fruits bien rouges.
Nous rejoignons le village d’Aït Ouham et nous frappons à la porte de la maison des parents de Brahim. Sa maman nous accueille, et me rouspète que je devais la prévenir pour qu’elle nous prépare un tajine aux pommes de terre fraîches, qui se mange à toute heure de la journée ! Une théière de thym est très appréciée.
Le ciel chargé à l’Ouest de nuages très noirs, je hâte le pat au cœur des jardins pour que la pluie ne nous rattrape pas. Nous traversons les villages construits en pisé et pierres. Nous pouvons voir un grenier fortifié malheureusement abandonné et évoquer la période des guerres tribales dont les Ait Bougmez craignaient l’arrivée des tribus sahariennes qui en périodes de grandes sécheresses s’aventuraient pour piller les villages du cœur de l’Atlas. Quelques troncs de trembles équarris sont entreposés au bord du chemin pour la construction d’automne des plafonds de toits des maisons. Il est agréable de s’imprégner de cette verdure, de la vie de cette haute vallée.
Nous remontons l’oued pour arriver au bivouac juste au coucher du jour.
Nous nous endormons sous les premières gouttes qui raisonnent sur les toiles de tentes tendues.