Sur les traces des anciennes caravanes

Jour 20

Jour 20

Ce matin la descente vers Sidi Kaoky fût rapide, aidée par la brise dont les mouvements dans les genêts sont agréables, comme le vent dans les tamaris du désert.

Nous marchons au long d’une haie de « tikida » le caroubier. Cet arbre au feuillage foncé pousse au pied du versant nord de l’Atlas, nous l’avons trouvé dans la basse vallée du tizi’n Tellouet et jusque dans les différentes vallées jusqu’à l’Océan. J’étais ravis de trouver de jeunes plantations de tikidas dans des vergers. On extrait de l’arbre une graine en forme de fève. Réduit en poudre il est utilisé depuis la nuit des temps dans la pharmacopée et dans l’alimentation. Excellent médicament (naturel) pour les problèmes de régulation gastrique, notamment diarrhée où constipation chez l’enfant. Ne coûte pas grand chose et très efficace, m’ont souvent dit les médecins voyageurs déjà à la retraite, l’ayant prescrit toute leur carrière.

S’utilise dans la cuisine en poudre et dans la pâtisserie, goût assez proche du chocolat.

Joie de retrouver l’Océan avec les belles lumières du matin, juste la brume marine levée.

Nous apercevons Sidi Kaouki enfin !

Depuis 3 jours quand nous croisons des personnes sur le chemin et que nous demandons la route pour Sidi Kaoky, leur première réponse est « Wa-y-li », qui signifie dans cette situation « vous n’êtes pas arrivés ! ».

Nous y voici.

Marabout surplombant l’Océan, les pieds dans l’eau à marée haute. Un lieu magique. Situé sur une échancrure rocheuse au bout d’une grande plage quand on arrive du Sud, comme venant du Nord en longeant l’Océan.

J’ai connu ce lieu il y a plus de 30 ans, il y avait une petite épicerie et un café attenant et une auberge restaurant. Maintenant le lieu est prisé en été. Aux fortes affluences les parasols se touchent. De nombreuses parcelles de cultures d’orge et de maïs ont été achetées et transformées en auberges, villas pour surfeurs, maisons d’hôtes et habitations de vacances créant de l’emploi et un magnifique développement de cette région. Actuellement tout est vide avec ce Covid.

Ce Marabout est visité traditionnellement par des familles qui viennent l’été de l’intérieur des terres avec des ânes, en pèlerinage pour plusieurs jours. Dans le « chouari » de l’âne se trouve un coq où une chèvre en offrande. (Offrande dégustée par les pèlerins). En général un quart est offert au gardien du tombeau.

J’étais frappé à l’époque par toutes ces familles, une véritable ruche. En même temps lieu de villégiature et de détente familiale.

En recherchant sur l’internet l’origine de ce Saint j’ai trouvé une histoire étonnante où Sidi Kaoki pourrait-être d’origine grecque. Se confirme avec le passage de commerçants grecs à Essaouira dans une époque ancienne.

« La présence des grecs est là dans la toponymie locale: takouyt n’sidi bouzib, Ifri n’sidi bouzid (poséidon, dieu de la mer, dieu du vin). La manière de s’habiller traditionnelle des femmes avec une superposition de jupes comme pour ces statues grecque. Les chanteuses amazighes dans tout le maroc s’habillent encore à la mode grecque.

Une famille amazighe sur place qui porte ce nom et qui se dit descendre de sidi kaouki mais ne peut revendiquer l’héritage du mausolée dans la mesure où chaque chambre est construite par une tribu, on parle par exemple d’agnar, chambre à l’étage, d’ida oublal, d’ait idir. »

On distingue très bien sur les images toutes ces chambres appartenants aux différentes tribus.

Nous longeons la plage à marée basse et croisons une barque de retour de pêche, annoncée par une nuée de mouettes gourmandes.

Nous prenons le sentier grimpant sur la pente sableuse parsemée de genêts, utilisé par les habitants du village de Wassen pour emmener leurs vaches et brebis boire au puits.

Nous installons le bivouac à côté de la petite maison de Larbi et Fatima, amis de plus de 30 ans. Fidèle gardien du phare du cap Sim qui passe ses nuits à vérifier que le phare fonctionne et envoie ses signaux pour les marins pêcheurs et le trafic maritime.

L’étape sera la plus courte de la traversée, juste bien pour savourer. Repos après de longues étapes et la dernière journée qui nous attend demain.

Je ne pouvais pas passer devant la maison de nos amis sans nous y arrêter.

Comme le temps est venté aujourd’hui, nous serons plus à l’abris que dans la forêt où le sable tourbillonne.

2 heures 20 mn de marche, 8 km parcourus.

Nous prendrons le temps de regarder des photos datant de 26 ans, où je me trouve avec Larbi et Zineb. Que le temps passe vite.

Mon ami Bélaid et grand peintre dont plusieurs de ses œuvres ornent un coin de murs de Dar Daif, est venu nous rendre visite et nous avons partagé un bon moment ensemble. Bélaid peint la vie traditionnelle des souks, dont les tons bruns sépias harmonisent ses œuvres.

Nous nous connaissons aussi depuis une bonne vingtaine d’années.

Je vais visiter le très ancien marabout Sidi Haghraz, dominé aujourd’hui par le parc éolien rendant autonome Essaouira et sa région. Quelle modernité, le Maroc est devenu pionnier des énergies propres en Afrique. Bravo.

Nous partageons le F’tor en famille avec l’équipe et nous nous régalons d’un tadjine au congre.

Nous nous allongeons sur les sofas dans le salon de la maison familiale construite par le père de Larbi dont les magnifiques plafonds en bois de thuyas soutiennent les toits plats.